Sortir du déni pour assurer la santé mentale au travail

Actualités professionnelles le 10 avril 2017

A l’heure où les risques psycho-sociaux font débat dans la sphère publique, des psychologues du travail s’interrogent toujours sur « l’obsolescence programmée des mots pour expliquer les maux ». Lors d’une conférence consacrée à la fin du travail à Nantes, le psychologue Yves Clot[1], a redit l’importance de négocier la qualité du travail.

Selon les derniers chiffres de la DARES, 38 % des personnels hospitaliers estiment ne « jamais être satisfaits de leur travail ». Un chiffre qui montre l’ampleur des difficultés pour les salariés à se reconnaître dans leur travail. Un chiffre sur lequel s’attarde Yves Clot, psychologue du travail et directeur de la chaire de psychologie du travail au Cnam. Invité au séminaire des « Rencontres de Sophie » consacré à « La fin du travail ? », à Nantes, Yves Clot a tenu conférence sur le Travail et le pouvoir d’agir.

Pour lui, « il est temps de sortir du déni du conflit autour de la question de la qualité du travail. Parce que la qualité du travail mérite consensus »l. Ses recherches en clinique de l’activité portent davantage sur les ressources psychologiques et sociales des travailleurs en situation, qu’en un inventaire des risques. Il revient, critique, sur la question brûlante des risques psycho-sociaux. A travers ce terme « RPS », il diagnostique une angoisse sociale : « On assiste à une obsolescence programmée des mots pour expliquer les maux. Si les mots ne tiennent pas en place, c’est parce qu’il y a une angoisse, une angoisse sociale due au déni du conflit autour de la qualité du travail ». Dès lors, comment sortir de ce travail « ni fait, ni à faire » qui mine les travailleurs et pèse sur leur santé mentale ?

Renouer avec sa créativité

Si la tendance actuelle est à la défense du bien-être et de la qualité de vie au travail, qu’en est-il de la fierté du travail bien fait ? Parce que ce qui rend malade les travailleurs, selon Clot, c'est bien « l'impossibilité de débattre sur les règles de travail bien fait puisqu’au travail, la délibération sur la qualité n'a pas droit de cité. » Or elle mérite consensus par le conflit, qu’il estime « condition sine qua non de la performance ». En se saisissant des critères du travail bien fait, et en les réinventant, le travailleur renoue avec sa créativité, opérateur majeur de santé. "Le conflit permet de ne pas tricher avec un réel qui bien souvent décontenance. Quand les conflits sont niés, le réel revient comme un retour du refoulé." En cela, le conflit donne le pouvoir d'agir sur sa condition.

Yves Clot intervient par ailleurs auprès des collectifs de travail afin qu'ils reprennent "la main" sur leur situation à travers l'expérience du désaccord par la confrontation de leur point de vue sur les critères du travail bien fait.

[1] Psychologue du travail et Professeur à la chaire de psychologie du travail du CNAM

Clémentine Hillairet

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