Les psychoses à bas bruit à l’Aide sociale à l’enfance

Le Journal des psychologues n°246

Dossier : journal des psychologues n°246

Extrait du dossier : La douleur : expérience et subjectivités
Date de parution : Avril 2007
Rubrique dans le JDP : Pratiques professionnelles > Clinique
Nombre de mots :

Auteur(s) : Mori Serge

Présentation

Dans ce contexte particulier de l’Aide sociale à l’enfance, l’établissement d’un diagnostic est un prérequis inhérent à tout accompagnement. Connaître, en effet, la structuration psychique d’un enfant favorisera l’élaboration d’un axe de travail approprié pour l’ensemble des professionnels de l’équipe concernée, dès lors que cette connaissance ne sera pas considérée comme un but en soi.

Détail de l'article

Comment parler des psychoses ? Les psychoses décrites, les psychoses expliquées, ne sont pas les psychoses : « On peut énumérer une série de symptômes, et l’essentiel n’aura pas été dit. » Le sujet psychotique n’est pas un conglomérat de symptômes.
Dès les premiers contacts avec le sujet psychotique, j’ai éprouvé une angoisse particulière. Mais il n’était pas encore question de se préoccuper des réactions singulières qui résultent d’une rencontre difficile avec le sujet psychotique. La plupart du temps, il s’est agi de chercher à se défendre contre les effets de cette rencontre gênante. J’ai été saisi par une « inquiétante étrangeté », l’autre a semblé me révéler à moi-même. Une étrange rencontre qui révélait que s’abritait en moi-même une source cachée d’angoisse. J’ai essayé avant tout de me défendre en tentant de reconstruire ma demeure d’homme civilisé. Méconnaître, ne serait-ce pas avant tout méconnaître cette angoisse ?
Ce sont là les toutes premières questions et réflexions auxquelles j’ai été convoqué dans ma pratique clinique, en psychiatrie adulte.

 

L’importance des marqueurs contextuels

Aujourd’hui, j’évolue en tant qu’homme et psychologue clinicien à l’Aide sociale à l’enfance (l’ASE). Ce n’est plus le même contexte, il ne s’agit plus de psychiatrie, nous avons à faire avec une autre réalité clinique.
J’entends par « réalité clinique » les différents contextes auxquels nous sommes confrontés tout au long de notre vie. Ce qui est nommé « contexte », c’est le milieu dans lequel évolue le sujet. C’est ce milieu (famille, école, institution sanitaire ou sociale, etc.) qui est différent. Ainsi, par exemple, imaginons un pilote de Formule 1 sur un circuit, roulant à 300 km/h, jusque-là rien d’étonnant. Maintenant, prenons le même pilote, à la même allure, sur une autoroute. On s’écriera : « Il est fou ! »
À la lumière de cet exemple, il importe de dire toute la difficulté qu’il y a à évoluer dans un contexte que je qualifierais de « contexte faussé ». L’ASE n’a pas à faire seulement avec la prévention et la protection de l’enfance, mais aussi avec ce qui pourrait être nommé : « les psychoses à bas bruit ».
Je hasarderai la formulation maladroite, j’en conviens, des questions suivantes : « Quoi de plus naturel que de rencontrer des sujets psychotiques en psychiatrie ? », « Quoi de plus “décalé” que de rencontrer des sujets psychotiques à l’ASE ? » Il me semble que les marqueurs contextuels ne sont plus du même ordre. Il n’en reste pas moins que la rencontre avec le sujet psychotique à l’ASE n’est pas une fiction ! Les accompagnements cliniques s’effectuent progressivement et peuvent être adaptés dans la prise en charge de l’enfant et de sa famille, lorsqu’il y a un repère diagnostique.

 

La nécessité d’un repère diagnostique

Les axes de travail dépendront du diagnostic ou, disons, de « l’évaluation » de la situation qu’aura établie le travailleur social. La question du diagnostic reste pour ma part fondamentale. Il n’est que de considérer le fait que nous n’avons pas la même manière de travailler avec les parents, l’enfant et-ou la famille, si nous avons affaire à des sujets psychotiques, pervers ou névrosés. Pas question de confondre les trois structures ! La réalité clinique est de cet ordre à l’ASE, nous avons affaire à une clinique du social où il est souvent difficile de pouvoir poser des repères tant pour l’enfant que pour nous-mêmes. C’est un véritable fatras ! Le diagnostic permet de repérer, de poser, de travailler avec l’enfant dans une visée préventive et protectrice. Mais, voilà, nos conceptions, nos savoirs théorique et pratique relèvent de compétences différentes, il ne s’agit pas uniquement de l’écart qu’il y a entre l’éducateur, l’assistante sociale, le médecin et le psychologue, mais aussi de l’écart d’un éducateur à un autre, d’un psychologue à un autre, etc. La vision déficitaire des psychoses ou, pis, de la psychose, lorsqu’il s’agit pour certains de traiter la maladie, peut représenter un frein majeur dans l’accompagnement de l’enfant. Toute la difficulté consiste à éviter de prendre les psychoses uniquement par le bout de leurs symptômes les plus manifestes et les plus aberrants ; (reste alors à les faire taire) et ensuite à ne voir dans les psychoses que le produit final des aberrations sociales. Par leurs excès respectifs, la chimio-psychiatrie comme l’antipsychiatrie se rejoignent dans une même éviction du sujet souffrant et de ses intimes complexités singulières. Je m’interroge ainsi sur le poids de nos conceptions respectives (psychiatres, psychologues cliniciens, éducateurs, assistantes sociales, etc.) du fonctionnement psychique et de ses troubles sur la représentation, l’image de la maladie que le sujet et sa famille vont adopter pour donner sens à ce qu’ils vivent. C’est une tâche difficile que de discerner ces implications idéologiques et peut-être d’évaluer de quel poids elles pèsent sur le destin du sujet.
C’est en partie ce dont il est question dans cet article : le rapport au savoir, pourquoi ? Tout rapport au savoir comporte une part idéologique, doctrinale ou théorique. Le diagnostic concernant le sujet est immanquablement marqué par les références, les appartenances théoriques et doctrinales du spécialiste qui le dispense. C’est ainsi que la question évoquée plus haut, du rapport de la maladie au sujet malade, se trouve au centre de la conception du diagnostic même. Comment, en effet, arriver à discerner les « troubles » relevant directement de la maladie et ceux qui résultent des réactions du sujet, entre ce qui relève de la genèse de la personnalité et ce qui résulte du dysfonctionnement de la subjectivité, ou encore ce qui est propre au sujet et ce qui est occasionné par les modifications des liens familiaux par suite de l’installation des « troubles » ?
Je dirais que ce travail concerne l’entretien clinique en premier lieu, le colloque singulier médecin malade, la rencontre psychologue-sujet, les entretiens préliminaires du psychanalyste constituent autant d’approches diagnostiques. Probante est à cet égard l’étymologie qui met en exergue l’aboutissement à une connaissance transversale. Transversale, parce que constituée à un moment donné pour un sujet dans l’espace d’une ou plusieurs rencontres. Transversale, également, dans la mesure où le savoir en voie d’élaboration peut rendre compte à la fois du fonctionnement psychique d’un sujet et d’un fonctionnement propre à d’autres sujets, spécifiques à des êtres de langage.
À ce titre, je souhaiterais illustrer mes propos à partir de la rencontre clinique avec un enfant que j’ai reçu en raison d’un signalement de l’école, pour le motif suivant : « trouble du comportement ».

 

Rencontres cliniques avec Kévin

Madame Moudo, la mère de Kévin, demande à rencontrer un psychologue, car, à cause du signalement établi par l’école, elle craint que la justice lui « enlève » son fils Kévin : « Je voudrais vous voir pour Kévin, j’ai peur que la justice me l’enlève. » Nous convenons d’un rendez-vous à la MDS (Maison départementale de la solidarité).
Madame Moudo se rend à la MDS avec Kévin, ils sont en salle d’attente lorsque je me présente à eux. Nous nous dirigeons vers mon bureau.
Madame Moudo est une femme âgée d’environ quarante ans. Elle est très marquée du visage, elle porte des tatouages sur l’avant-bras, ses cheveux sont abîmés, elle est de taille moyenne, elle porte un jean sale et une chemise débraillée avec des taches sur le col. Kévin quant à lui est un enfant âgé de onze ans, au visage avenant, des joues replètes avec des taches de rousseur. Il a une coupe de cheveux très courte avec une teinture blonde, la couleur de ses yeux noisette en forme d’amande lui donne un air fort sympathique.
Je demande à Kévin ce qui l’amène ici.
Kévin : « Je suis là pour pas qu’on sépare maman, Sonia, Samir et moi à cause de la justice.
— C’est quoi la justice ?
— La justice, c’est le mal. J’ai déjà été placé à cause de la justice et j’ai été séparé de ma mère et de ma sœur. En plus, mon père, il est en prison, rien qui font du mal les juges !
»
Je m’adresse à Madame Moudo : « Qu’est-ce qui vous amène madame Moudo ?
— Le petit, il a raison, y a en marre de ses enculés de juges, y nous font chier !
Mais, lui aussi, il arrête pas de faire des conneries. À croire qui veut faire comme son père… Toi aussi tu veux finir en taule ?
— Non, je veux pas !
»
Kévin semble ressentir une gêne, il agite sa jambe, regarde le sol et devient rouge. Mais mon intervention clinique vise à restituer la parole et non à interpréter ce qui se donne à voir.
« Qu’est-ce que tu ressens Kévin ?
— Rien, J’ai chaud.
»
Face aux propos violents de madame Moudo, je me demande finalement si la gêne que j’attribuais à Kévin n’est pas en fait liée à ma propre gêne.
Tout au long de cette première rencontre, madame Moudo emploie un vocabulaire ponctué d’injures à l’égard de la justice, des juges et de la loi, et Kévin reprend le discours de sa mère. Je n’ai pas tenu à prolonger l’entretien dans ces conditions, et j’ai exprimé de manière très ferme le fait de ne plus utiliser un vocabulaire aussi grossier en présence de Kévin. Indépendamment de la gêne que je ressentais, il était de ma responsabilité d’intervenir pour couper à cette jouissance.
M. M : « Ouhais mais j’en peux plus, dit-elle en pleurant, Kévin y file du mauvais coton…
— Kévin, tu entends ce que dit ta mère ?
— Ouais.
— Qu’est-ce que tu en penses ?
— Des fois, je me bagarre à l’école. Mais, c’est pas ma faute, les autres y m’énervent et le maître, après, y me punit qu’à mo
i… »
Je propose à Kévin s’il souhaite revenir pour « dire ses bagarres ».
« Je ne comprends pas Kévin. Tu veux bien m’expliquer la prochaine fois pourquoi tu te bats.
— O. K.
»
Durant les premiers entretiens, il parle de ses activités avec la Game boy.
J’aime les jeux vidéo et les combats, j’ai même un jeu interdit aux moins de 18 ans.
— Pourquoi il est interdit aux moins de 18 ans ?
— Parce que on peut tuer les flics, on vole les bagnoles… On se bat.
— Tu aimes te battre ?
— Non, mais je suis obligé.
— Pourquoi ?
— Parce que, sinon, on dit que je suis une trompette !
— C’est quoi une trompette ?
— Une trompette, c’est quand on a peur de se battre.

Kévin présente des difficultés à exprimer ses émotions, il bégaie, il a du mal à terminer ses phrases, voire ses mots. Durant nos entretiens, il n’avait jamais jusque-là manifesté ce genre de problème. Je suis dans le désarroi le plus total, la situation semble empirer pour Kévin, je ne comprends pas, je ne sais pas, et c’est peut-être parce que je ne sais pas, que je ne comprends pas, que la clinique commence…
« C’est la première fois que tu bégaies Kévin, comment tu expliques cela ?
— Oui, à l’école, le maître aussi, il a remarqué, même les copains. Je sais pas. C’est nouveau.
— C’est la première fois que cela t’arrive ?
— Oui. Je voudrais plus bégayer, mais c’est plus fort que moi !
— Qu’est-ce qui pourrait te faire bégayer ?
— Je sais pas, peut-être parce que je bouge pas assez.
— Qu’est-ce que tu veux dire par bouger ?
— Avoir des activités, aller dehors, m’amuser… Comme les copains y font avec leur père.
— Qu’est-ce que tu souhaiterais, essaie de m’en dire un peu plus.
— Eh, ben, je sais pas, faire des choses avec mon père, qui me porte au ballon voir des matchs.
— C’est qui ton père ?
— C’est Imed, mais il est en prison et je le vois pas, sauf quand maman elle m’amène en prison le voir. Y a l’autre, mais je le hais !
— C’est qui l’autre ?
— L’autre, c’est mon autre père, maman elle m’a dit qui nous a abandonnés et qui voulait pas me voir. Elle m’a dit qui se droguait. Mais Imed lui, il est bien, mais je le vois pas non plus. En fait, je voudrais aller quelque part dans une autre famille, où il y a une dame et un monsieur avec des enfants, après on joue, on bouge. Mais je veux pas que la justice elle nous sépare avec maman.
— Pourquoi la justice va vous séparer ?
— Parce que, maman, elle dit tout le temps que c’est à cause des juges qui nous arrive tout ça.
— Et toi qu’est-ce que tu dis ?
— Moi je veux pas que maman elle ait de la peine, mais en fait j’ai peur des fois quand je suis à la maison.
— De quoi as-tu peur ?
— Eh ben, y a plus d’électricité à la maison, et y a pas de lumière et, le soir quand je dors, j’ai peur qu’un monsieur vient avec un couteau pour me tuer, mais si y avait mon papa, j’aurais pas peur. J’ai peur du noir, alors je veux de la lumière et, la lune, elle éclaire tout.
— C’est quoi tout.
— Elle éclaire la salle où je dors, mais ça fait peur aussi. C’est comme dans les films avec le clair de lune.
— Quel film ?
— Les films de peur. Je regarde les films avec maman et après je m’endors devant la télé.
— Tu parles des films que tu vois avec tes copains ?
— Oui. Même que, des fois, on me demande si j’ai vu le film et celui qui l’a pas vu c’est une trompette.
— C’est important pour toi de ne pas être une trompette ?
— Je veux pas être une trompette, les copains en plus y disent que je suis pas normal, que je suis un bâtard !
— Qu’est-ce que cela veut dire bâtard ?
— Un bâtard, c’est quand on traite mon père. Alors, je me défends. Mon père, une fois, quand je suis allé le voir en prison, y m’a dit qui fallait pas se laisser faire dans la vie et qu’il fallait se battre !
— La prochaine fois, tu veux bien m’expliquer pourquoi il faut se battre ?
— D’accord. »

Nous convenons d’une date pour le prochain rendez-vous, et je lui donne un coupon qui en indique le jour et l’heure.
Quelques jours avant notre prochaine rencontre, madame Moudo me téléphone. Elle est en pleurs, me dit que Kévin va être renvoyé de l’école, car il a encore frappé un camarade de classe. Elle m’apprend que l’école veut une nouvelle fois effectuer un signalement, madame Moudo a peur, dit-elle, qu’on ne les sépare de nouveau et que la justice s’en mêle. Elle me demande si je peux l’accueillir de toute urgence, avec Kévin. J’accepte.
Je reçois Kévin et prie madame Moudo de patienter en salle d’attente.
« Que se passe-t-il Kévin ?
— Je me suis battu.
— Est-ce que tu te souviens de ce dont nous devions parler pour la prochaine fois ?
— Non, je m’en souviens pas.
— Tu t’es battu pourquoi ?
— J’ai des images dans ma tête, mais je peux pas les traduire.
— Tu veux les dessiner ?
— Oui.
»
 Kévin accompagne sa production par la parole, il dit :
« Dans ma tête y a des voix, ça fait comme le catch, y me disent de frapper, sinon y me tue. C’est Qyne, il est moitié homme, moitié monstre. Qyne, c’est le diable, c’est un monstre, y s’appelle Qyne comme Kévin, parce que c’est lui qui me dit de faire ça, de frapper, moi je le fais, et les voix, elles me disent “vas-y, crève-le, allez tue-le”. »
Kévin pleure à chaudes larmes en expliquant son dessin, et il rajoute : « Pendant que je vous parle, ils me disent qui vont me crever ce soir parce que j’ai parlé, j’ai peur. »
Je me rapproche de Kévin et pose ma main sur son épaule, je lui demande : « Depuis quand tu entends ces voix et Qyne ?
Eh ben, en Corse quand j’étais jeune, y avait des grands qui volaient et moi aussi je devais voler, et y m’ont dit que si je répétais quelque chose à ma mère, y me tueraient. Des fois, vous savez, je vois le Christ en croix et, après, c’est moi qui mettent sur la croix. Depuis, ils sont là, c’est Qyne. Je veux qui bouge, je veux le faire partir à jamais ! »
Cette éclosion délirante à partir des deux éléments : l’apparition surprenante du bégaiement et les passages à l’acte (bagarres répétées) à partir d’une sorte d’injonction surmoïque, ce « Qyne », ébauche de métaphore délirante (moitié homme, moitié monstre) qu’il semble opposer aux injonctions insensées des voix, pourraient représenter pour Kévin un rempart pour pallier sa souffrance. Par ailleurs, Kévin utilise, pour parler et se parler, les signifiants, les locutions, les traits grammaticaux, la prononciation, provenant pour une grande part de sa famille, particulièrement de sa mère et de ses camarades de classe.

 

Le danger d’un étiquetage réducteur

À ce jour, l’équipe ASE, l’éducatrice référente, l’équipe du foyer d’accueil de Kévin et moi-même avons pu déterminer des axes de travail différents, en prenant en compte la structure psychique de Kévin, sans pour autant l’étiqueter d’une vision déficitaire. Il s’adapte au sein de son groupe et évolue de manière positive, tout en ayant besoin d’un espace de parole et d’une écoute. Que serait devenu Kévin, si nous nous étions limités à cette expression toute faite « trouble du comportement » ? Si notre attention s’était focalisée sur la disparition des « bagarres » récurrentes ?
Que retrouve-t-on dans cette rencontre clinique avec Kévin ? Peut-être le principe d’éviter les excès d’objectivation nosographique que peuvent induire les données de la psychopathologie. Ces découpages diagnostiques sont d’autant mieux opérants dans leur valeur indicative qu’il est préférable de les laisser à la place qui leur convient : à l’arrière-plan. Sans doute est-il important de pouvoir repérer une symptomatologie et de trouver à se soutenir d’une appellation nosographique qui soit le support au moins indicatif d’une orientation diagnostique, si ce n’est pronostique. Ainsi pourra-t-on mieux définir la perspective clinique, une fois que seront reconnues des pathologies qualifiables de manière différentielle. Mais, c’est à la condition de ne pas se laisser enfermer dans un tel codage préalable, de ne pas en attendre plus qu’un repérage préliminaire. Car ce n’est pas à partir de cette seule donnée que s’orientera la pratique, là où il s’agit, dans les cas de la rencontre avec un humain, si inexpressif, si régressé soit-il, d’atteindre en lui la personne enfouie.
Il ne s’agit pas d’un malade à guérir, mais d’un sujet à entendre quant à l’orientation ou la réorientation de son désir. Cela implique un certain nombre d’orientations de principe articulant la perspective psychopathologique de l’analyse à sa concrétisation dans l’expérience clinique.
Ces rencontres cliniques ont concerné et concernent Kévin en tant que sujet désirant à écouter et à aider par le travail d’analyse de ce qu’il exprime, là où il peut se trouver en errance, hors d’atteinte communicante. Pris dans une aliénation qui le rend absent de son destin désirant en l’arrêtant sur le disque rayé et répétitif du symptôme, il importe essentiellement de rendre l’autonomie de son devenir de sujet à Kévin. On aura compris que la finesse n’est certes pas ici dans l’approfondissement diagnostique. Elle réside plutôt dans la mise en œuvre relationnelle, d’un axe de travail qui est de rendre à Kévin la capacité de son désir, là où il était arrêté ou en impasse. Notre travail consiste alors à créer des ouvertures. ■

 

Bibliographie

Castanet H., 2006, Un monde sans réel, La Rochelle, Association Himeros.
Freud S., 1971, « L’inquiétante étrangeté », Essais de psychanalyse appliquée, [1919], Paris, Gallimard, pp. 163-210.
Freud S., 1973, « Névrose et psychose », Névrose, psychose et perversion, [1924a], Paris, PUF, pp. 283-286.
Lacan J., 1981, Les Psychoses (Séminaire III), [1955-1956], Paris, Le Seuil.
Pédinielli J.-L., 1994, Introduction à la psychologie clinique, Paris, Nathan.
Santiago Delefosse M., Rouan G., 2001, Les Méthodes qualitatives en psychologie, Paris, Dunod.
Wyrsch J., 1956, La Personne schizophrène, Paris, PUF.

 

Pour citer cet article

Mori Serge  ‘‘Les psychoses à bas bruit à l’Aide sociale à l’enfance‘‘
URL de cet article : https://www.jdpsychologues.fr/article/les-psychoses-a-bas-bruit-a-l-aide-sociale-a-l-enfance

Partage sur les réseaux sociaux

Abonnez-vous !

pour profiter du Journal des Psychologues où et quand vous voulez : abonnement à la revue + abonnement au site internet

Restez Connecté !

de l'actualité avec le Journal des Psychologues
en vous inscrivant à notre newsletter