Pas de coup d’arrêt à l’arrêté

Actualités professionnelles le 13 juillet 2022

Le crédo antipsychanalytique, et plus généralement la non prise en compte de la pluralité des pratiques des psychologues, continue de dominer le champ politique, en dépit des protestations de la profession. En témoignent les suites données à l'arrêté du 10 mars 2021 relatif à la définition de l'expertise spécifique des psychologues exerçant auprès des plateformes de coordination et d'orientation (PCO) – lesquelles sont destinées à prendre en charge de manière précoce les enfants souffrant de « troubles du neuro-développement ». L'arrêté, rappelons-le, restreint l'intervention des psychologues de ces plateformes aux seules pratiques cognitivo-comportementales.

Quoique présentant des arguments et des points de vue différents, quatre requêtes[1] en annulation de l'article 2 de ce texte ont été déposées auprès du Conseil d'Etat, pour s'opposer à ce qui était de nouveau perçu comme une ingérence technocratique dans le principe du libre choix, par les psychologues, de leur méthode thérapeutique, au nom de normes réductrices. La requête lancée à l'initiative de l'Appel des appels, du collectif des 39 et du Printemps de la psychiatrie soulevait par exemple qu'il n'était pas dans les compétences des ministres de décider du type de définir « l'expertise spécifique » des psychologues, que c'était là une atteinte à leur liberté d'exercice, et qu'il ne leur était à cet égard pas possible de subordonner entièrement l’intervention des psychologues dans le parcours de soin au respect des bonnes pratiques telles que définies par la Haute autorité de santé (HAS). Un point d'ailleurs clairement stipulé par la Cour de Cassation en 2018 : « Les recommandations de la HAS ne sont destinées qu'à l'information des professionnels de santé et du public et n'ont pas de valeur obligatoire ».

Les quatre requêtes ont été appelées ensemble le 18 mai dernier devant le Conseil d'Etat. Au cours de l'audience publique, le Rapporteur public a conclu à l'annulation de l'article 2 pour vice de forme, suscitant un peu d'espoir auprès des requérants. Mais, fait assez rare, son avis n'a pas été suivi par les Juges du Conseil d'Etat, qui ont finalement rejeté la requête. Seule ouverture, le Conseil d'Etat indique au point 6 de sa réponse, rendue le 13 juin dernier, que la liste des programmes que doit respecter le psychologue n'est pas exhaustive et qu'elle doit être « réactualisée périodiquement en fonction de l'évolution des connaissances scientifiques, des recommandations et des outils ». Mais dans le contexte actuel de mise à l’écart de la psychanalyse, et comme les programmes doivent se référer aux « approches recommandées », autant dire que l'espoir de pouvoir négocier une place aux thérapies par la parole est plus que mince.

 

Laetitia Darmon

 

[1]Les quatre requêtes ont été portées respectivement par :

  • Appel des Appels, Printemps de la psychiatrie, Collectif des 39, SNP, SUIEERPP, FFPP, Inter-collège Psychologues PACA, Collectif POP, Collectif Grand Est, Fédération CMPP Bretagne, FDCMPP, Collectif CMPP N-A, Humapsy, La main à l'Oreille, RAAHP, Le fil Conducteur Psy, API, Stop-DSM, CEMEA et des individuels.
  • Association des psychologues freudiens.
  • Syndicat CGT-APAJH33.
  • Collège des psychologues de l’ARISSE, collège des psychologues de l'APSI, SNP, SIUERPP, Association Quelle hospitalité pour la folie, Association des psychologues de la Fondation Vallée, Association Figures psychodramatiques, Société française de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent et disciplines associées, Association Espace Résilience.

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