L’envoûtement entre science et croyance

Le Journal des psychologues n°253

Dossier : journal des psychologues n°253

Extrait du dossier : Le WISC se met en IV
Date de parution : Décembre - Janvier 2008
Rubrique dans le JDP : Pratiques professionnelles > Clinique
Nombre de mots : 3500

Auteur(s) : Anröchte Cyprien

Présentation

Les croyances qui ne se réduisent pas aux religions ne peuvent avoir de fonction chez les patients ou les soignants qu’en cas de besoin vital qui conditionne leur émergence. La prise en compte des croyances personnelles des patients dans la prise en charge thérapeutique se manifeste, dans ce texte, comme un levier permettant l’accès au noyau d’une souffrance universelle, en passant par le particulier. Réflexions autour de l’histoire de Mme T.

Détail de l'article

Madame T est une femme âgée de cinquante ans, mère de quatre filles, âgées de vingt et un ans, dix-huit ans et de jumelles de seize ans. Jusqu’en 2003 – date à laquelle elle arrête toute activité professionnelle –, elle enseignait l’allemand dans un collège. Elle vit seule depuis que son mari a entamé, l’année passée, une procédure de divorce. Celui-ci a conservé le domicile conjugal et s’occupe des enfants.
Mme T fait remonter le début de ses difficultés à l’année 1998, lorsque, à la suite de la naissance de ses jumelles, elle décide de prendre, sur les conseils de sa mère, un médicament pour inhiber la lactation. Selon Mme T, ce médicament aurait provoqué des hémorragies, des insomnies et un amaigrissement (1). Elle consulte alors de nombreux spécialistes qui ne font que, selon elle, « l’intoxiquer avec des traitements ». Elle se tourne ensuite vers les médecines parallèles et la voyance afin d’y trouver une forme de réassurance. En 1999, poussée par sa famille, elle consulte un psychiatre qui lui prescrit un traitement neuroleptique qu’elle investit comme un véritable « antidote » au premier médicament. Il résulte de sa prise une phase de rémission d’un an, où elle « retrouve ses muscles, ses cheveux et elle redevient elle-même » (2).
En 2000, Mme T décompense à la suite d’une séance d’acupuncture : « Elle a tout bousillé en faisant n’importe quoi […], elle m’a défigurée. » C’est à cette époque qu’elle est hospitalisée en psychiatrie pour la première fois, mais elle est réticente aux soins et peu coopérante. Après sa sortie, elle mettra rapidement un terme à tout suivi. En 2005, elle est de nouveau hospitalisée dans notre service.

 

La rencontre avec Mme T
Cela faisait plusieurs années que Mme T consultait une radiesthésiste. Au début, cela la rassurait, car la radiesthésiste lui disait qu’elle irait mieux. Puis elle s’est « sentie envoûtée, ensorcelée », elle n’était plus elle-même. Selon elle, la radiesthésiste, divorcée, était jalouse d’elle, car elle était « heureuse dans [son] couple ». Elle l’a donc « fait tomber amoureuse d’un collègue » à qui Mme T a écrit une déclaration d’amour avant de tout avouer à son mari. La radiesthésiste l’aurait alors poussée dans « un sommeil profond, un coma », cause qu’elle attribue à son hospitalisation. Toujours réticente à l’aide que nous pouvions lui apporter, Mme T restera dans un déni massif de l’aspect psychopathologique de ses troubles, tout en s’étonnant elle-même qu’une personne de son niveau d’érudition puisse croire être l’objet d’un envoûtement. Lors des entretiens, elle persistera dans l’idée qu’elle a commis une faute en « allant voir la radiesthésiste » et que cette dernière est la cause de tous ses malheurs. Elle tirera peu de bénéfices de l’hospitalisation, les traitements neuroleptiques lui faisant peu d’effets. Elle arrêtera d’elle-même toute chimiothérapie dès sa sortie, demeurant peu accessible à notre discours et semblant incapable de toute élaboration psychique. Elle acceptera par la suite un suivi médical, puis, avec plus de difficultés, le passage d’une infirmière à son domicile et des activités à l’hôpital de jour.

 

Le choix de l’approche théorique
De multiples approches sont possibles pour étudier le cas de Mme T, chacune ayant un intérêt particulier. Il peut sembler étonnant de vouloir utiliser des outils ethnopsychiatriques pour une « autochtone », mais, du point de vue de l’ethnopsychiatrie, l’intérêt du soignant se situe dans la manière dont le sujet vit sa culture et comment elle lui permet d’appréhender le monde. Ainsi, nous pensons être ici face à une personne tiraillée entre deux cadres culturels :
• un mélange de croyances populaires et de théories véhiculées par certaines médecines parallèles ;
• et le savoir scientifique représenté, notamment, par l’institution psychiatrique.
Nous nous retrouvons donc dans le cas où « deux représentations d’un symptôme de niveau épistémologique différent coexistent (3) ». Or, l’approche transculturelle nous permet l’analyse « d’un univers double, deux mondes culturels hétérogènes, dont certaines logiques sont difficilement conciliables » (Baubet et Moro, 2003). En effet, « l’alternance perpétuelle entre le code culturel du patient et celui de son thérapeute […] est susceptible de fournir les matériaux appropriés à la construction d’une méthodologie transconceptuelle » (Nathan, 1994).
Le soignant doit donc pouvoir se décentrer de ses propres représentations et maîtriser un double discours, aidé en cela par une approche complémentariste des difficultés du sujet en souffrance (Nathan, 2001). Cette approche « n’exclut aucune méthode [qu’elle soit psychanalytique, anthropologique, sociologique, etc.], aucune théorie valable, [elle] les coordonne » (Devereux, 1972). Elle ne se situe pas dans un champ théorique clairement délimité, mais plutôt à la frontière de plusieurs (Nathan, 2001).

 

Archétypes et croyances
Mme T a eu une éducation catholique, mais elle est peu pratiquante, contrairement à sa mère. Elle n’a jamais montré au cours de sa vie un attrait particulier pour l’occulte ou les invisibles culturels. Afin d’étayer notre propos concernant son rapport culturel au concept des possessions, nous nous appuierons sur le principe des archétypes développé par C. G. Jung. Contrairement à l’inconscient personnel qui se forme à travers l’histoire du sujet, l’inconscient collectif est lui constitué de « formes représentatives les plus générales et les plus reculées dont dispose l’humanité », dont les archétypes sont les thèmes (Jung, 1993). Ceux-ci, dans le cadre de la pathologie mentale, « s’empare[nt] de la psyché […] et l’oblige[nt] à transgresser les limites du secteur strictement humain […], voilà un des motifs pour lesquels les hommes ont toujours eu besoin des démons » (Jung, 1993). C’est donc à travers des images anciennes, mais appartenant à l’inconscient collectif, que Mme T nous donne à voir sa souffrance, sans que sa rationalité ou la nôtre puissent alors la ramener à une réalité commune et partageable par tous.
Avant d’aller plus avant dans notre étude, il est important de noter que toute idée d’envoûtement ou de croyances occultes n’est pas toujours, fort heureusement, délirante. Nous ne pouvons parler d’idée délirante qu’à partir du moment où le sujet est envahi par cette idée et qu’il entre ainsi « en rupture avec son groupe, son environnement et la réalité commune partagée (4) », comme dans le cas de Mme T.

 

L’irrationnel qui produit du sens
Nous nous rendons bien compte, à travers l’histoire de Mme T, des relations conflictuelles entre science et croyance. Ainsi, bien qu’elle consulte de nombreux médecins, aucune réponse n’arrive à lui procurer un sentiment de réassurance. Selon T. Nathan, la médecine offre au mieux des causes aux problèmes, alors que Mme T souhaite des réponses à ses questions : « Pourquoi cela m’arrive ? Qu’ai-je fait ? »
M. Mauss écrit que « les pratiques magiques ne sont pas vides de sens » (2004). Parmi les représentations sociologiques des actes magiques, l’auteur attire notre attention sur « l’image […] du lien qu’on lie ou que l’on délie : lien des maléfices qui, méchamment, a été noué ».
Or, c’est notre incapacité de faire du lien, de donner du sens aux symptômes de Mme T, qui fut constamment attaquée lors des entretiens : « Je ne suis pas malade, j’allais mieux avant d’aller voir la radiesthésiste. » S. Freud voyait déjà, dans cette fuite du réel, la possibilité pour le Moi de dénier une réalité, pour en reconstruire une nouvelle plus conforme pour le sujet à ses désirs, « où le monde fantasmatique représente le magasin où sont pris la matière ou les modèles pour la construction de la nouvelle réalité » (Freud, 2002).
Ainsi, persuadée que tout ce qui se passe est irrationnel, « même l’expérience contraire n’ébranle pas la croyance » (Mauss, 2004). Peu importe, alors, qu’un traitement médicamenteux ait pu à un moment donné apporté un mieux être, cette donnée est intégrée au système de pensée : « C’était un antidote, mais je suis allée voir la radiesthésiste et, maintenant, ça ne peut plus marcher. »
Dans la période actuelle où s’intensifient les déplacements des personnes, des familles et des objets, une période où les changements sociaux sont rapides et nombreux, le recours à l’occulte pour trouver des repères, des réponses, est fréquent. Pour s’en rendre mieux compte, il suffit de consulter les forums de discussion des nombreux sites Internet consacrés à la sorcellerie, où nous retrouvons des histoires similaires à celle de Mme T. Un autre témoin de cette évolution est le nombre de prêtres exorcistes qui a triplé, en France, depuis dix ans (5).
Donc, face à l’idée d’envoûtement, une analyse de ce système de croyance pourrait nous aider à retrouver du sens dans le discours de Mme T.

 

Comment pouvons-nous croire en l’envoûtement ?
De tout temps, des individus se sont déclarés envoûtés. Les cas d’envoûtement sont des phénomènes quasi universels, ayant partout des manifestations similaires (perte de contrôle de soi, insomnie, cauchemars, maladie de peau, sensation corporelle étrange, etc.). L’envoûtement est un maléfice redouté, il est même considéré comme pouvant être mortel par certains (Delams, 2003). Comme le pense Mme T au sujet de sa radiesthésiste, l’envoûtement peut être le fruit de la jalousie d’une sorcière. Nous subodorons que, pour notre patiente, cette radiesthésiste en est l’image archétypale. En conséquence, elle lui trouve certaines caractéristiques propres aux sorcières. Celles-ci peuvent être bénéfiques ou maléfiques (adjectifs qu’utilisera Mme T), et ce sont des femmes solitaires qui inspirent à la fois attirance, crainte et haine. Or, Mme T évoquera à travers son histoire les sentiments de rejet et d’attrait irrésistibles qu’elle ressent pour sa radiesthésiste.
Dans les rituels d’envoûtement décrits, l’offense et la luxure sont omniprésentes. Ainsi, le sorcier peut employer comme ingrédients « le sang d’animaux réputés ardents : colombe, caille, moineau, belette, etc. » (Palou, 2002). Dans certaines formules incantatoires, il est également fait référence au péché originel :
« Ô Dieu, vous qui avez fait Adam et Ève des quatre éléments – de même Ève communiqua vraiment à Adam et l’a fait pécher – de même vraiment qui mangera ce fruit fasse toujours ma volonté. » (Palou, 2002.)
Le péché de chair dans la sorcellerie est récurrent, comme dans les descriptions du sabbat, dans l’iconographie représentant des sorcières (voir les gravures d’A. Dürer, de Van Mechelen…) et dans la littérature où elle se mêle parfois au morbide :

« Souvent même, en plein deuil d’un parent, la terrible sorcière
S’est couchée sur le corps pour donner
au mort un baiser,
Pour lui ouvrir la bouche avec ses dents,
mordre sa langue
Qui colle au palais sec, et confier au lèvres glacées
Un message secret pour les ombres du Styx.
» (Lucain, 1927.)

Ainsi, à la sorcellerie se mêlent donc l’impiété, le sacrilège, pour ceux qui la pratiquent, mais aussi pour ceux qui y ont recours. C’est probablement ce qui fonde la croyance des uns et le besoin de croire des autres, comme c’est le cas de notre patiente.

 

Envoûtement et culpabilité
Nous comprenons mieux le sentiment de culpabilité vécu par la personne envoûtée, car elle souffre d’avoir commis une faute. Mme T est tourmentée par le fait d’avoir consulté la radiesthésiste. C’est cette dernière qui lui a dit qu’elle était amoureuse de l’un de ses collègues de travail et qui l’aurait poussée à lui écrire une lettre pour déclarer ses sentiments. Les religions ont traditionnellement toujours rejeté la sorcellerie, et ses adeptes sont assimilés au Diable. En ce qui concerne le christianisme, cela est vrai dès ses origines, notamment à travers l’épisode de Simon dans les Actes des Apôtres (VIII, 18-23), lorsqu’il se voit refuser de pouvoir donner l’Esprit Saint par l’imposition des mains contre de l’argent (Ph. Barthelet, 2005).
Jusqu’au XIIIe siècle, l’Église porte une certaine tolérance à l’égard des croyances superstitieuses, envisageant les adeptes de la sorcellerie comme victimes d’illusions. Cependant, dès saint Thomas d’Aquin (1226-1274), nous voyons se diffuser l’idée que le pouvoir des sorciers est accordé par le Diable. Les XVIe et XVIIe siècles furent, en Europe, la période la plus intense dans la répression de la sorcellerie et des sorciers, notamment par ses tristement célèbres procès (Palou, 2002).
En théologie, la notion de culpabilité s’appuie sur le libre arbitre : « La responsabilité personnelle ne met pas l’homme à l’abri des embûches du démon […], car le tentateur offre le mirage d’une alliance profitable décisive (6) ». Pour Mme T, ce pacte avec le démon se manifeste à travers sa radiesthésiste : elle pensait pouvoir résoudre ses difficultés en allant la consulter. Les phénomènes d’envoûtement s’inscrivent donc dans le contexte d’une lutte du bien contre le mal : « Satan veut nos âmes pour les ôter à Dieu. » Au fil du temps, Mme T nous semblait comme prise au piège de sa culpabilité, et l’expression incessante de celle-ci l’isolait toujours davantage dans sa souffrance.

 

La fonction de la douleur
Malgré nos conseils répétés, Mme T envahissait l’espace relationnel familial de ses plaintes, entraînant un rejet de plus en plus profond de la part de son entourage. Nous avons décrit plus haut l’importance du sentiment de culpabilité de Mme T. Pour le christianisme, la maladie a longtemps été une punition « résultant directement de la transgression d’une loi ». Le sujet se doit alors « d’éprouver de la culpabilité au regard de ce qui est considéré comme un châtiment mérité » (Laplantine, 1992). Or, la souffrance, dans la religion chrétienne, possède deux motivations qui se rejoignent : « le perfectionnement moral et la quête de salut » (Le Breton, 1995).
La maladie et la douleur apparaissent dans la Bible, après le péché originel d’Adam et Ève. Cette rupture, par la consommation du fruit défendu de l’arbre de la connaissance, marque l’accession à la conscience et donc à la capacité de libre arbitre que nous avons déjà évoquée plus haut. D’autres récits de l’Ancien Testament fonctionnent sur un schéma identique où « le châtiment tombe sur celui qui s’éloigne du droit chemin et provoque la colère divine » (op. cit., p. 82). Nous pouvons citer les dix plaies d’Égypte (Exode, VII-XI), les lèpres de Guéhazie (Rois 2, V-XXVII) et de Marie, la sœur de Moïse (Nombres, XII-10), ainsi que les maux de ventre du roi Joram (Chroniques 2, XXVII).
Dans le Nouveau Testament, la passion du Christ vient « effacer la souillure de la faute des origines » (ibid., p. 174). Ce sacrifice fait de l’humanité la débitrice de Dieu à l’infini. L’homme ne voit alors son salut qu’à travers sa propre souffrance. Aussi, « le christianisme a fait historiquement de la douleur une jouissance, une voie d’entrée privilégiée pour l’accès à la vie éternelle ».
Pour R. Girard (1972), la violence, notamment celle présente dans le sacré, serait depuis toujours un moyen de structurer la société. De même, en donnant à sa douleur une dimension qui lui échappe, Mme T arrive paradoxalement à rendre celle-ci plus acceptable, mais seulement pour elle-même et sans articulation avec la réalité extérieure. Ainsi, la psychose qui constitue une perte de lien avec le monde extérieur serait le produit de « la réalité qui s’est refusée au désir de façon grave » (Freud, 1968).

 

Symbolique de l’envoûtement
Comment expliquer la persistance des convictions délirantes chez  Mme T ? C’est probablement du côté de la constellation familiale que l’on peut trouver des éléments de réponse. En effet, T. Nathan écrit : « Je ne connais, par exemple, pas meilleure méthode efficace à tous les coups pour déclencher les théâtres familiaux et les restructurations transgénérationnelles, que les accusations de sorcellerie » (Nathan, 1986).
Nous pouvons noter plusieurs éléments de réflexion sur une dynamique familiale complexe et perturbée. Ainsi, à travers l’absence d’allaitement de ses jumelles, Mme T décrira des difficultés à se retrouver dans une fonction maternelle et à se réapproprier son vécu corporel au postpartum. Nous remarquerons également, au cours de la prise en charge, la fragilité des barrières transgénérationnelles. En effet, la mère de Mme T entretient une relation très fusionnelle avec sa fille et a tendance à l’infantiliser et à se montrer très intrusive dans sa vie privée. De plus, la fille aînée de Mme T a été amenée à prendre une place de « maîtresse de maison », jonglant entre ses études, les taches ménagères et assurant une fonction maternelle, par défaut, auprès de ses sœurs. Cette confusion des rôles est telle qu’un jour, la fille de Mme T a mis sa propre mère à la porte de son ancienne maison. Cet événement découle de l’incapacité pour Mme T de pouvoir envisager sa vie sans son mari et ses filles auprès d’elle, ce qui se traduit par des conduites proches du harcèlement vis-à-vis de sa famille. Elle cherche sa place, mais elle se retrouve comme prise au piège dans une relation avec sa mère qui lui rappelle celle qu’elle avait développée avec la radiesthésiste : à la fois insupportable, extrêmement envahissante, mais dont elle ne peut se passer.

 

Pour conclure
Cette courte approche nous montre l’importance de la dimension culturelle dans les pathologies psychiatriques. Si cette difficulté existe, alors que nous nous situons dans une culture partagée entre le soigné et le soignant, nous pouvons donc nous représenter l’extrême complexité qui existe à prendre en charge les sujets migrants. L’approche transculturelle et la méthodologie complémentariste nous permettent ainsi d’appréhender les problématiques avec un regard différent. Sans attaquer ses croyances, et avec empathie, nous avons pu, avec Mme T, réussir à discuter et élaborer autour de ses difficultés, même si le chemin à parcourir est encore long.  
Cette réflexion sur le cas de Mme T nous pousse également à essayer de faire la part des choses entre ce qui peut être pathologique et ce qui s’inscrit dans le domaine de la culture et celui des croyances personnelles. Nous sommes les témoins d’une culture qui devient une construction de plus en plus personnelle. Ainsi, les croyances de Mme T mélangent des éléments relevant du registre religieux, des médecines parallèles et des sciences occultes : une mosaïque culturelle qui risque de transformer les soins en procédés mécaniques vides non seulement de toute substance, mais également d’un sens culturellement admissible qui participerait dans l’élaboration de sa souffrance.
D. Le Breton (2005) questionne ce recours aux médecines parallèles et nous met en garde contre « un décalage de plus en plus croissant entre les demandes en matière de soin et de santé et les réponses médicales », notamment dans la recherche de sens et de symbolique, mais surtout dans l’attention que l’on doit porter à l’individu et à ses attentes subjectives.

 

 

Notes
1. Les effets indésirables décrit pour ce médicament (le Parlodel®) ne sont pas connus. Mais des confusions, hallucinations, excitations psychomotrices, etc., ont été exceptionnellement rapportées chez des femmes en postpartum.
2. Le Parlodel® est un agoniste dopaminergique, et le traitement neuroleptique prescrit, le Moditen®, a des propriétés antidopaminergiques.
3. K. Faure, C. Arbus et L. Schmitt, « Actualités des possessions diaboliques », article consultable sur www.medspe.com
4. K. Faure, C. Arbus et L. Schmitt,
op. cit.
5. K. Faure, C. Arbus et L. Schmitt, op. cit.
6. P. de Labriolle, « Exorcisme et psychiatrie », article consultable sur www.acmid.free.fr

 

Bibliographie

Barthelet Ph., 2005, « Magie », in Dictionnaire culturel en langue française, Paris, Dictionnaires Le Robert.
Baubet T. et Moro M.-R., 2003, Psychiatrie et migration, Paris, Masson.
Delmas M. C., 2003, Superstitions et croyances des pays de France, Paris, Éditions du Chêne.
Devereux G., 1972, Ethnopsychanalyse complémentariste, Paris, Flammarion.
Freud S., 1968, Métapsychologie, Paris, « Folio », Gallimard.
Freud S., 2002, Névrose, psychose et perversion, Paris, PUF.
Girard R., 1972, La Violence et le sacré, Paris, Grasset.
Jung C. G., 1993, Psychologie de l’inconscient, Paris, Le Livre de poche.
Laplantine F., 1992, Anthropologie de la maladie, Paris, Payot.
Le Breton D., 1995, Anthropologie de la douleur, Paris, Éditions Métailié.
Le Breton D., 2005, Anthropologie du corps et modernité, Paris, PUF.
Mauss M., 2004, Sociologie et anthropologie, Paris, PUF.
Nathan T., 2001, La Folie des autres, Paris, Dunod.
Nathan T., 1994, L’Influence qui guérit, Paris, Odile Jacob.

 

Pour citer cet article

Anröchte Cyprien  ‘‘L’envoûtement entre science et croyance‘‘
URL de cet article : https://www.jdpsychologues.fr/article/l-envoutement-entre-science-et-croyance

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